Faux Goûts...senteurs indésirables.
Il y a une petite semaine j'évoquais en ces colonnes les déviations aromatiques empyreumatiques et grillées qui affectent les vins blancs. En me penchant plus avant dans ma mémoire sensorielle, il m'est venu l'idée de sérier ici les principaux défauts que l'on retrouve dans les crus issus du chardonnay de la Côte de Beaune. En effet l'amateur - qui n'est pas toujours un débutant bien entendu - n'a pas la chance d'observer la naissance et l'évolution de ses senteurs et arômes et peut être amené à les confondre avec une complexité aromatique à relier en priorité au cépage ou au terroir.
Ces notes variétales et telluriques "pures" peuvent ainsi être parasitées par l'équilibre des fruits récoltés et/ou les résidus de la vinification et de l'élevage qui elles sont quasi systématiquement "impures". Ces deux pôles que l'on pourrait qualifier de " naturel" et "artificiel" s'opposent et conduisent les vinificateurs à opérer des choix qui tendent vers une orientation " magnétique" qui marque sensiblement leurs vins. De manière plus insidieuse les vins produits depuis des temps immémoriaux ont toujours été à la croisée de ces deux orientations et se retrouvent culturellement singularisés par elles. Qui ne comprends pas que le seul terroir ne peut suffire à expliquer l'image qui caractérise une appellation essaiera toujours de trouver des accents "extra naturels/ artificiels" dans les vins qu'il déguste car ces accents indélébiles portent en eux une part de la mise en œuvre qu'observent ceux qui les façonnent.
Pour éclairer mon propos sur les dérives grillées que peut porter une bouteille j'ai listé dans mon précédent article une somme de perceptions - non exhaustives - qui affectent les crus blancs, ici, je vais partir de la note aromatique pour mieux expliquer sa genèse et ses différentes perceptions et interprétations dans le vin fini lors de l'olfaction.
1- La note olfactive iodée: cette senteur qui peut être discrète si elle provient d'une récolte " mouillée " un peu botrytisée est souvent envahissante dans les vins qui sont marqués par la pourriture non noble, dîtes " grise ". Impossible à éradiquer sans user de lies pures - possible lorsqu'une même appellation est produite sur différents climats et que certains ne sont pas atteints par la pourriture. Années impactées fréquemment: 1981,2001 et 2010.
2- la note olfactive "pommée"(de pomme verte ou chaude): le moût ou le vin a pris l'air entre la fermentation alcoolique et la fermentation malo-lactique ou cette dernière à duré très longtemps à un rythme lent. Ce dernier cas intervenant fréquemment dans les moûts à fort potentiel acide. Années impactées: 1994,2008.
3- la note olfactive "végétale": les senteurs de foin coupé, de sauge ou d'iris proviennent d'une maturation sans soleil en année tardive combinée à un débourbage un peu trop lâche.Peaux épaisses, degrés assez élevés mais dépassant rarement 13, petite dessiccation des baies par le vent... Le vin vire au nez sur la fleur de gentiane. Années: 1991,2004, 2011.
4- la note olfactive "cireuse" ou " miellée ": une vendange trop mûre, peu acide et parfois marquée par un vrai botrytis. Souvent le signe d'une évolution prématurée sauf si la couleur reste or à reflets verts. Année 1983, 2006.
5- la note olfactive "d'orange confite": une année de botrytis qui se combine souvent avec des couleurs or prononcées. Très aromatique jeune, s'affinant parfois au vieillissement mais jamais sur les notes fraîches les plus nobles. La texture visqueuse peut séduire. Année: 1989, 1995.
6- la note olfactive de truffe blanche: issues de raisins passerillés et/ou flétris. Pas désagréable si discrète mais hélas souvent combinée à des acidités basses: 2003.
7- la note olfactive grillée : voir le texte écrit à son propos dans ma chronique précédente.
8- la note olfactive "de beurre": fraîche ou rance, elle est due à une bactérie lactique fonctionnant lors de la FML, oenococcus oeni, qui génère lors d'une fermentation tumultueuse un métabolite précurseur d'arôme, le diacétile. Toutes les années peuvent être impactées mais curieusement surtout les moûts fortement concentrés.
9- la note olfactive dîtes "réduite": Nébuleuse nasale entêtante qui évoque tour à tour la mèche soufrée ou qui va sous sa forme évolutive H2S vers le fameux mercaptan, un thiol qui sent l'oeuf punaie. Elle est la pire déviation organoleptique qui soit. Générées par des lies bourbeuses qui proviennent de fruit marqués par des soufres résiduels conjugués à des contenants ne laissant place à aucune micro-oxygénation. Elle doit impérativement être circonscrite avant mise par traitement au cuivre. Son "résidu" olfactif est le bourgeon de cassis.
10- la note olfactive de type "asperge": ajout massif de sulfite à la mise en bouteille et lente combinaison avec la partie dites totale du SO2 sous verre.le SO2 libre restant en général à un niveau élevé. Le vin vieillit bien mais se montre maigre et peu complexe.