Etape 1 - Préambule - (Ecrit le 8 Avril 2012)
j'ai été bien discret ces derniers temps sur le site des "degustateurs" car le travail d'élevage et celui dans le vignoble se poursuivent selon des rythmes bien cadencés. Ce bref répit "pascal" est une heureuse occasion pour vous communiquer quelques nouvelles fraîches concernant le domaine mais également plus généralement l'ensemble du centre Bourgogne. Que se passe t'il donc dans le vignoble et les caves murisaltiennes ces temps-ci? Voici en quelques paragraphes les tendances actuelles:
Les vins du millésime 2010 sont en préparation de commande pour leur livraison au Québec. Ils partiront de nos chais au début du mois de Mai. C'est un millésime très rare au sens où il a généré une petite moitié de production par rapport à une année habituelle. Les livraisons seront donc modestes en quantité et je m'en excuse par avance. En revanche je puis affirmer que ces vins possèdent un profil que j'aime beaucoup, fait de concentration et de finesse, mais aussi d'une immédiate séduction que je n'avais pas "vue" chez nous depuis les 99. Je sais que lorsque vous les goûterez vous m'en parlerez sans concession...j'attends cela avec impatience.
Les 2011 blancs qui sont en élevage ont désormais tous terminés leurs fermentations malo-lactiques et ils se présentent sous un jour vraiment engageant. J'apprécie la très grande pureté des blancs qui n'étaient pas marqués par le botrytis. Vous le savez je n'aime pas travailler avec de la pourriture - fut-elle noble - dans mes vins secs car elle gâte irrémédiablement les notes florales les plus subtiles. 2011 est de ce point de vue d'une précision olfactive impressionnante avec des vins qui embaument la fleur de vigne, le chèvrefeuille et le jasmin pour les plus concentrés. Je l'avoue sans détour, j'aime les déguster comme cela à ce stade de l'élevage. Les nouvelles cuvées de Chassagne Romanée et Remilly et de Bourgogne Blanc sont par ailleurs une source d'étonnement et de questionnement constante. Comment les "interpréter" selon des contraintes analytiques tout de même un rien différentes de mes Meursault et premiers crus? Nous verrons si mes options ont été les bonnes dans quelques mois!
Les 2011 rouges feront des vins au profil remarquablement gourmand. Construits sur des degrés mesurés, ils bénéficient assez curieusement d'une acidité modeste qui les fera ressembler au niveau de la douceur de texture aux excellents 2009. ils n'en auront pas toute la densité et sans doute devront être bus plus sur la jeunesse de leurs arômes mais fruitée vraiment remarquable. Pas des monstres de concentration mais de belles choses à venir il me semble. Je vous tiendrai au courant de leur évolution dans les caves car les rouges changent toujours de profils durant l'été lorsque la prise de bois et l'amalgame de SO2 s'opèrent complètement.
Le millésime 2012 s'annonce encore une fois très précoce et nous sommes repartis sur les bases de 2007 et 2011 avec des bourgeons qui "pointent" à la fin de Mars et des feuilles qui sont apparues formées autour du 5 Avril. Si le temps se poursuit ainsi nous récolterons donc au début du mois de Septembre. Refaire un 2011? Je signe tout de suite! Nous avons passé deux coups de charrues pour « cavaillonner » les ceps dans un premier temps puis pour libérer ceux-ci des herbes qui les entourent avec les fers inter ceps. Voir les photos sur DC si vous en avez le temps. Le travail de main est en ce moment très pressant et je suis en retard pour coucher mes baguettes de Guyot simple dont les bourgeons continuent de s'épanouir. J'ai bossé hier toute la journée et il me paraît évident que le lundi de Pâques ne sera pas une fête sans labeur. Mais je n'en souffre pas, car il fait beau et être dans les vignes par ce temps là, c'est aussi du plaisir!
Nous avons planté il y a deux semaines un nouvelle parcelle de Bourgogne blanc à une densité de 15.500 pieds par hectare. Un choix effectué après avoir observé que sur le finage de Bourgogne blanc "Haute Couture" de Meursault il est impératif de produire peu par ceps pour donner à nos vins la profondeur souhaitée. On pourra ainsi offrir une cuvée très haute densité à nos acheteurs dans les années à venir et nous expérimenterons des systèmes de taille et de conduite du feuillage nouveau en compagnie de l'INRA... de Bordeaux! En effet je continuerai les expériences faîtes grâce au Greenseeker sur la vigueur du feuillage avec le chercheur Jean-Pascal Goutouly et pierre Sauris. Que de belles observations à venir!
Dans un autre ordre d'idée je travaille avec la tonnellerie "Ermitage" et Maxime Cromier pour affiner le grain de nos merrains afin d'utiliser pour nos fûts - pièce de 228 litres - des séchages plus longs que la moyenne sur des origines de bois très racées. Ainsi le millésime 2011 a vu l'utilisation de bois des forêts du Tronçais et de Bertrange sur des grains très fins séchés quatre ans à l'air libre. Ces "48" mois ont livré des vins d'une neutralité boisée sidérante et je suis vraiment enthousiasmé par la précision des moûts qu'ils contiennent. La fraîcheur et les senteurs de poire william combinées à des notes florales d'une finesse fantastique. J'ai hâte de vous faire goûter cela! Les premiers crus et villages 2011 en contiendront d'ores et déjà 1/3 et nous passerons à 60% sur 2012 avec toujours environ 25% de bois neufs pour toutes les cuvées en dehors de l'aligoté élevé en cuve.
Pour finir je me suis fait un petit plaisir personnel en refaisant totalement l'éclairage et les allées de nos caves qui ont été intégralement brossées et dépourvues de leurs anciens graviers pour de nouveaux petits cailloux achetés " lavés sans poussière". Il y a longtemps que je voulais une cave sentant l'eau de roche, le vin et le bons merrains, débarrassées des odeurs de "champignons" sur des éclairages adaptés aux couleurs des vins...c'est fait! Et j suis convaincu que sans cette ultime pureté là, il n'est point possible d'être "ultimement" pur dans les vins. Cela doit être mon enfance en Suisse...mais je suis absolument obsédé par le côté "clean" des voûtes, des allées, du gravier et des fûts. Donc brossage toutes les semaines et nettoyages des pièces selon le même rythme. Kate me dit que c'est obsessionnel...elle a raison!
Etape 2: En Mai fais ce qu'il te plait! - (Ecrit le 6 Juin 2012)
...Et en Avril il ne fallait se découvrir d'un fil...tant la météo clémente de Mars s'est muée en une succession de périodes de pluie et de vent qui ont largement contribué à retarder une végétation partie "en fanfare". D'une année très précoce du style de 2007 ou 2011 nous sommes passé à un millésime quasiment "tardif" car le temps a ralenti la pousse et surtout compliqué à gérer. En effet la pression mildiou est une des plus fortes de ces dernières années et il a été difficile de passer dans les rangs pour labourer et traiter car ceux-ci étaient souvent humides et la végétation inter-rangs poussait à vive allure. Un casse-tête qui conduit de nombreuses exploitations à traiter le WE ou a passer avec les bidons "à dos" dans les zones qui ne sont pas accessibles.
Quelques heureux motifs de satisfaction toutefois. Le gel a épargné la quasi totalité du vignoble - si l'on excepte les bas de Chassagne et Santenay -, la pousse de la vigne s'effectue de manière assez douce et donne le temps d'effectuer un bon travail de main pour ébourgeonner et puis les charges de raisins sont assez généreuses il me semble. Le tout évoluant plutôt favorablement car la fleur apparue autour du 1er Juin semble avoir été à son pic le 5 dans les chardonnays et quelques jours plus tard dans les pinots. On vendangera donc entre le 11 et le 20 Septembre selon toute vraisemblance.
Je ne peux m'empêcher toutefois de voir cette année comme un peu "curieuse" et j'ai nettement l'impression qu'elle nous réserve encore des surprises. Le temps n'arrive en effet pas à se stabiliser et il est évident qu'il va être complique de gérer les passages de traitement pour juguler les maladies, sans parler de la gestion des mauvaises herbes qui sont cette année fort envahissantes.
Etape 3 : fleur de pinot, gare! - (Ecrit le 7 juin 2012)
Il a fait un temps froid et pluvieux hier et cela risque de perturber le passage de la fleur dans les pinots noirs des deux Côtes. Les chardonnays plus avancés en souffriront moins et ne devrait dans que peu subir la "coulure" qui fait avorter certains fruits.
Les passages pour traiter les vignes sont décidément peu aisés cette année et les sacs d'eau qui tombent régulièrement empêchent de bien travailler dans les vignes en rendant les sols très gras. Tout le monde est en "bout de traitement" et sans doute un peu inquiet...
Etape 4 - 30 Juin: Grêle en côte de Beaune - (Ecrit le 2 Juillet 2012)
Le temps n'est pas clément en 2012 et la succession des périodes de beau temps avec celles pluvieuses marque sensiblement le travail qu'il faut effectuer dans le vignoble. Combien il aura été difficile cette année de suivre les vignes au plus près en canalisant leur vigueur et en maîtrisant les passages nécessaires de traitement contre les maladies. Les vignerons n'avaient sans doute pas connu pareil casse-tête depuis le millésimes 1998 et il faut remonter bien loin dans les mémoires pour observer les éléments naturels conjuguer leurs efforts avec autant de régularité pour perturber les producteurs et les rendre nerveux.
En dépit de cela, et même si les vignes présentent des profils atypiques faits d'herbes et de chardons, les récoltes étaient jusque là préservées. Nous savions que les pinots seraient peu productifs car la coulure les a fortement impacté lors du passage de la fleur mais les vignerons estiment toujours avec raison que les petites charges autorisent souvent des vins concentrés. Un mal pour un bien... supportable! Bien sûr le mildiou est également dans les vignes et l'oïdium rôde- je vous en ai parlé par ailleurs -mais cela concerne surtout les zones basses et les zones humides et à force d'acharnement dans les traitements, de réflexion sur le moment de les épandre et de labeur à des heures indues, le soir ou les WE, cela ne se passait pas si mal, en tout cas pas de manière catastrophique. J'ai même longtemps affiché un certain optimisme tant je considérais que si le temps se mettait au beau à partir du 15 Juillet, nous serions dans la possibilité de livrer un très bon millésime. Depuis mon raisonnement a subi de fortes turbulences...
...car la grêle a frappé la quasi totalité de la Côte de Beaune le 30 Juin. Une grêle féroce, s'étalant sur plusieurs kilomètres et balayant de Santenay à Corton l'ensemble des coteaux et de la plaine. Une "grêle égalitaire" où tout le monde a reçu son lot de désolation et de tracas, une grêle insidieuse qui a haché les feuilles et décapité des baies à peine naissantes en fauchant à tout va, chardonnays et pinots. Le stade de fermetures des capuchons n'y a rien fait et la Côte a subi une douche écossaise de grésil et de grêlons - gros comme des oeufs de caille et à certains endroits comme de petites balles de golf - qui a laminé son vignoble.
Comme souvent toutefois certaines zones souffrent encore plus que les autres. Le coeur du vignoble, soit Pommard, Volnay et le Nord de Meursault et Monthelie ont reçu les pires volées de glace depuis 2001 et des secteurs sont détruits à plus de 50%. Pommard et Volnay sont désormais intégralement sinistrés car la quasi totalité des baies sont marquées. Les extrémités sud et Nord ont été moins touchées Corton, Savigny et Beaune Nord mais Santenay et Chassagne subissaient leur troisième "attaque" de l'année, L'escadrille des grêlons est assidue en 2012!
Dans ce contexte de désolation, le vigneron courbe l'échine et s'en remet à la qualité de son travail pour sauver ce qui peut l'être encore. Certains ont une assurance grêle qui couvrira les frais professionnels et permettra de ne perdre "que" la valeur de la récolte touchée, un moindre mal qui n'est évidemment pas satisfaisant et qui ne permettra pas de couvrir les gros investissements qui ont été opéré dans certaines propriétés...bref c'est quand même un peu la "scoumoune" car à partir de maintenant nous entamons un cycle qui nous entraîne vers une "année de sauvetage" où l'on sait pertinemment que notre travail sera plus dur et que la récolte sera de petite quantité. Espérons que la qualité sera en revanche au rendez vous! Mais il va falloir trier, trier et trier encore...
Étape 5: récolter... quand? (Ecrit le 7 Septembre 2012)
Nous sommes le 15 Septembre et cette date correspond plus ou moins aux fameux cent jours après le passage de la fleur de vigne. En général un moment respecté par de nombreux vignerons pour démarrer leur récolte. Cette année toutefois peu nombreux sont ceux qui ont déjà commencé à couper leurs précieux fruits. La faute à une année aussi imprévisible qu'émaillée de forces coups de grêle et départs de maladie. (On se réfèrera à mes textes ci dessus pour plus de détails).
Le mois d'Août ayant démarré par un second orage de grêle dévastateur les vignerons ont cru au pire. Mais après cet épisode désespérant le temps s'est mis au beau et il a fait très chaud durant près de cinq semaines. Une sorte de petit miracle qui a permis sans doute de sauver une récolte alors très altérée et mal partie pour mûrir.
Cependant si le soleil a autorisé une belle maturité, si le vent a fait tomber certains grains secs impactés par la grêle et si les traitements ont dans l'ensemble - mais irrégulièrement - jugulés les maladies, il subsiste toutefois des effets liés à ce qui s'est passé lors des quatre premiers mois du cycle végétatif. Les bois, les feuilles et les baies portent des stigmates que l'on ne pourra pas totalement éradiqué même en triant très sévèrement. De ce fait cueillir des raisins à juste maturité restera une vraie gageure car l'acidité quoi qu'il arrive sera au rendez vous comme une sorte de reliquat des conditions météorologiques de l'année.
Un casse tête s'annonce donc car il y a fort à parier que le 22 Septembre jour du changement de Lune le temps se mette à varier et la pluie à tomber. Dans ces conditions QUAND faut-il y aller? Prendre les fruits tôt pas tout à fait mûrs par beau temps où attendre et risquer d'obtenir de meilleurs degrés avec un temps mouillé?... Chacun aura SA solution et elles seront toutes porteuses du choix des producteurs, nous verrons QUI aura opéré les bons choix en Mars
2013.
Etape 6: La récolte 2012 vue de l'intérieur - (Ecrit le 22 Septembre 2012)
Il est difficile de tenir un journal de vendanges dans une année comme 2012 car le travail a été incessant et fort éprouvant pour les esprits et les organismes. Nous n'avons pas eu une minute d'arrêt depuis un mois car il a fallu composer avec un temps capricieux, des maturités décalées et des prises de décision bien difficiles à objectiver en fonction de nos options de vinifications.
Quoi qu'il en soit j'avais pris la décision dès la fin du mois de Juillet de couper des raisins à pleine maturité sans m'occuper des conditions climatiques dans lesquelles ils seraient rentrés et je m'y suis tenu. Un adage simple a guidé mes pas :
" Mieux vaut couper des raisins mûrs sous la pluie que des raisins verts sous le soleil ".
Une phrase sibylline que Jacques Marie Duvault-Blochet mettait en exergue il y a déjà plus de 150 ans avec un bon sens consommé de l'observation et une farouche volonté de produire des vins équilibrés, denses et capable de se bonifier par une maturation sous verre de plusieurs années. Bien entendu, elle colle parfaitement avec ce que je souhaite faire dans l'appellation Meursault, à savoir continuer de perpétuer une forme de vin connue depuis plusieurs siècles, celle d'un vin totalement sec ayant un milieu de bouche possédant une très grande fraîcheur ET une sensation mœlleuse. Bref, je ne souhaite en rien changer ou faire évoluer le style de ce vin qui se livre sans effort et naturellement sous ce jour en raison de ses climats formidables, de sa météorologie de limite nord d'exploitation du cépage chardonnay, et de la texture visqueuse que ce dernier autorise en même temps que de son idéale acidité s'il est cueilli juste mûr et vinifier sans le moindre botrytis.
Les vignes du domaine ont été marquées comme toutes celles de l'appellation par deux orages de grêle qui ont fait perdre plus de la moitié de la récolte. Dans nos malheurs une lueur d'espoir, car ces deux coups de grêle ont été précoces et les fruits restants étaient au final moins marqués par les impacts que ce que l'on imaginait initialement. Nos Vieilles Vignes du côté de Puligny étaient même dans un état impeccable et surtout chargées idéalement pour produire des vins dignes de cette appellation exigeante. Les premiers crus ont donné entre 20 et 25 hl/ha, alors que dans les villages nous avons récoltés nos parcelles avec des rendements compris entre 28hl et 37 hl. Pas si mal au fond!
Sur les 55 pièces de Meursault VV que peu produire le domaine selon les rendements autorisés, nous en avons donc rentré 34 mais je souligne que je ne dépasse jamais les 45, ce qui au final donnera près de 9.000 bouteilles de cette cuvée qui est quand même le coeur de notre production et en tout cas celle qui permet de faire vivre le domaine. Les crus eux seront plus limités et comme en 2010 ils seront rares. 4 pièces de Tessons et deux de Cras...un peu plus dans les autres heureusement, mais quand même ce n'est pas vraiment l'opulence!
Si je reprends le fil de cette vendange depuis le début, je me rends compte qu'elles ont été particulièrement étalées, voyez donc:
- Un démarrage "prologue" le 17 Septembre pour couper les Volnay-Santenots qui étaient vraiment idéalement mûrs - 13,5° - et sains. Nous en produirons 750 bouteilles au lieu des 1800 habituelles, mais les fermentations se passent bien avec des couleurs profondes et des tanins abondants et fins.
- Poursuite des rouges le 20 Septembre avec des Bourgogne rouges à 13,2° après tri à la parcelle. Nous en produirons 7/8 pièces au lieu de 13 habituellement. Je les élèverai dans des super-fûts - Ermitage Tronçais 48 mois - qui seront neufs ou de un vin...j'en attends beaucoup.
- Les premiers crus blancs ont été rentrés à partir du 22 jusqu'au 24 Septembre. Aucun d'eux ne sera chaptalisé car ils titrent tous entre 13,2 et 13,5 degrés naturels. Des moûts purs, très riches, bien dotés en acidité (valeurs tartriques de feu!), qui sont déjà entrain de fermenter grâce à leurs levures indigènes. Des 2010 bis avec un peu plus de finesse il me semble si j'en juge les dégustations des jus non fermentés et clairs.
- Les Meursault VV furent récoltés les 24,25 et 26 Septembre, ce dernier jour sous une pluie battante, cela sera CEPENDANT sans aucun doute la plus belle cuvée car les très vieux pieds de Pellands étaient vraiement magnifiques. J'ai réalisé cette année six cuvées différentes - titrant toutes entre 12, 7 et 13,3 degrés - en les élevant dans les mêmes bois et selon les mêmes proportions de fûts. Pas un gramme de sucre, pas de levure...rien! Et quand tu ne fais rien c'est mieux!
- Bourgogne blancs - 28 hl/ha - et Aligoté - 31 hl/ha - furent coupés sous le soleil le 27, triés à la parcelle - comme tous les autres -, ils titraient tous les deux 12,5 degrés et ne seront bien entendu pas corrigés en sucre.
- Enfin hier 28 Septembre nous avons terminé à Pommard avec une récolte hyper saine ( pas le moindre grain sec ou botryrtisé ce qui dans le contexte de l'année est miraculeux -, minuscule et je l'espère de haute qualité...nous verrons!
Désormais tous les blancs sont pressés et à part les deux derniers coupés ils sont tous partis en fermentation ce qui nous interdit quasiment l'accès à la cave sans masque. Les rouges sont encore en phase de cuvaison et le Volnay sera je pense décuvé en fin de semaine prochaine.
Voilà je crois vous avoir livré une "photo" assez claire de ce qui s'est passé lors de cette récolte 2012. Ah si un mot encore, je suis vraiment des plus heureux de la voir se terminer dans ces bonnes conditions tant nous en aurons "bavé" cette année...
NB: certains lecteurs habitués pourront s'étonner de ne plus me voir donner une revue d'ensemble sur ce qui se passe et s'est passé dans la Côte. C'est un fait absolument volontaire. Je me sens désormais pleinement vigneron et négociant. Plus question donc de livrer des points de vue - que je voulais pourtant le plus neutres possible - sur ce qul se vit autour de moi...mais je continuerai à vous parler des flacons bus, des climats tels que les vois et de mon job!
Etape 7 : A fleur de peau (Ecrit le 1er Octobre 2012)
Il y avait cette fatigue accumulée depuis le mois d'Avril. Il y avait cette inquiétude qui planait, ces non dits pesant qui gangrènent l'assurance et font douter de tout, d'un rien, de soi, des autres et de la manière de vivre une passion. Tantôt se sentir des ailes, tantôt avoir les pieds en plomb mais surtout peur de ne pas pouvoir y arriver. Assurer est une chose, le faire selon sa conscience en est une autre. Je n'étais pas serein cette année,2012 est né dans la douleur au domaine Buisson-Charles.
Mars annonçait pourtant une récolte précoce et Avril se passa sans la moindre petite gelée, mais que dire d'une suite qui ne cessa de nous marquer par ses incohérences, ses coup bas, ses maladies, nous laissant un peu plus abattus à chaque revers culturaux. Le temps joua contre nous une étrange partie ou nous fûmes bousculés chaque journée de l'été ou presque. Pas un jour sans qu'il fut nécéssaire de se persuader de continuer en affrontant les difficultés les unes après les autres...ou plutôt les unes sur les autres!
Je me revois le 31 Juin à Arras au Main Square festival recevant les photos de Louis me montrant un tapis de grêle devant chez nous. On s'inquiétait pour « Mildium », on a eu la foudre, le vent, les grêlons et la frousse de perdre une pleine année de sueur et d'espoir. Kate en pleurs, je me suis dit alors qu'après tout adviendrait ce qu'il adviendrait et que nous aurions ce que nous pourrions. Il arrive un moment où lutter ne suffit plus, il faut aussi ce petit truc qui s'appelle la chance et qui permet d'espérer. Nous savions dès ce jour que la moitié de notre possible revenu était perdue et que désormais cela ne pourrait plus être pire.
Je n'ai pas eu le goût alors de continuer à écrire, pour vous dire que cela n'allait pas, pour vous raconter notre détresse car à quoi sert de se plaindre quand on a choisi de vivre aussi des moments comme ceux là. Mon journal s'est interrompu, j'étais vide et sans mot pour vous conter notre quotidien. N'allez croire toutefois que je me lamente, non, et c'est peut-être pire, tu bosses pour produire un idéal que tu ne pourras pas offrir, ton temps est compté et tu as perdu avant même de finir la partie! Pourtant il faut y aller...encore,encore et encore. Le labeur des vignes se termina début Août, trois semaines après une année "normale". Le calice jusqu'à la lie.
Deux semaines à Pompéï ne furent pas de trop pour recharger des batteries et pour nous faire espérer produire du Falernum avec le peu de grappes nous restant! Mais une chose est certaine ce cru là aura en lui la nervosité et l'énergie de concepteurs à "fleur de peau".