Corton Clos du Roi Grand Cru

Publié par Site internet officiel du Domaine Buisson-Charles

Corton Clos du Roi

Caractéristiques techniques:

  • Densité de plantation: 11.000 pieds par hectare

  • Vignes de + de 55 ans

  • Taille: 1/3 en cordon de Royat et 2/3 en Guyot simple

  • Double ébourgeonnage de printemps

  • Labour intégral des sols

  • Rendements : 30 à 40 hl par hectare

  • Vendanges manuelles avec tri des raisins sur table 

  • Cuvaison de 14 à 21 jours avec 4 jours à froid ( 11°)

  • Vinification en raisins entiers

  • Aucun enzymage

  • Pressurage pneumatique

  • Débourbage statique

  • Élevage en fûts avec 30 % de bois neufs et des fûts de moins de quatre ans.

  • Mise en bouteille sans collage et sans filtration

  • 300 à 900 bouteilles produites par millésime

Caractéristiques Du Grand Cru Corton Clos du Roi:

Envisager le Clos du Roi de Corton en un texte concis est une bonne manière de montrer que je n'ai que fort peu de goût pour  les légendes invérifiables qui embellissent la vérité afin d'en tirer profit. Celles qui entourent le Corton sont innombrables et la constance avec laquelle elles mettent en avant "l'historicité romantique" de cette grande colline devrait être négligée et combattue.

Ainsi une des premières affirmations que l'on retrouve dans les considérations récurrentes sur la colline est qu'elle serait le trait d'union entre la Côte de Beaune et la Côte de Nuits. Rien ne me parait plus faux, tant le substrat qui la compose, l'altitude où ses grands crus se trouvent, la pente qui les caractérise, son influence éolienne et sa morpho-géologie générale en font "un monde à part" très étroitement lié au beaunois.

Son histoire est d'ailleurs entièrement liée au puissant négoce de la place de Beaune qui par nombre d'aspects a ici réussit à imposer une vision de vins de "classe" plus que de crus singulièrement identifiés et identifiables. Grand cru rouge du beaunois, unique et pourtant constellé de climats pouvant tous être Corton en même temps que localisés par le nom ancestral de son cadastre, il est un Janus qui, "improbablement", aurait des faces différentes en même temps qu'une nature unique. Le petit village d'Aloxe ne s'y est d'ailleurs pas trompé au moment de changer de patronyme en le complétant avec le nom de son meilleur cru, il a simplement et logiquement choisit Corton. Longtemps d'ailleurs il a refusé d'octroyer ce nom a ses voisines de Pernand et de Ladoix et les bagarres syndicales furent sévères au moment de désigner quelles terres auraient droit au prestigieux épithète de Corton. Heureusement le célèbre Clos Charlemagne chevauchait de longue date Pernand et Aloxe, sinon...comme le nez de Cléopâtre, cela eut pu changer la donne!

Ainsi sans prétendre à l'omniscience je vous livre ici quelques faits historiques avérés:

Nous sommes certain que les coteaux d'Aloxe, Pernant et Ladouée ( sic)sont en culture depuis le septième siècle car les évêchés environnant conservent des traces d'échanges de biens ou de frais liés à leur entretien. Comme souvent alors, les biens ecclésiastiques sont octroyés par le pouvoir en place et travaillés par des bras paysans. Ainsi, en 858, Modoin évêque d'Autun, cède ses terres de famille noble à la cathédrale qu'il dirige et ce sont les bras du vigneron Jonas qui s'occupent de celles-ci. Dès cette époque les coteaux sont divisés en quartiers qui correspondent à des entités cultivées par les ordres ecclésiastiques, la propriété nobiliaire et celle moins conséquente des notables bourgeois.

Il y a dès lors des lots - clos ou non - qui sont propriétés ducales car la Bourgogne est sous la domination de ceux ci. Peu enclins à poser genoux à terre devant leur suzerain roi de France en laissant des revenus leur échapper, ils afferment ces terres en les faisant cultiver pour en vendre le fruit et en consommer le vin. Il est ainsi assez vain d'imaginer qu'ils nomment ces terres " Clos des Ducs " à ce moment là. D'autant qu'Aloxe ne possède aucune construction ducale et que le vin est acheminé par chariots à l'hôtel des Ducs de Beaune, la voisine. On comprend aisément que le raccourci communément admis consistant à signifier que ces derniers soient devenus les " Clos des Roi " que nous connaissons aujourd'hui n'a guère de sens. Ce sont des vignes ayant appartenu au roi après avoir été celles des Ducs... nuance.

L'histoire nous apprend que les grands Ducs de Bourgogne dominent la région de 1363 à 1477 soit une période - la Toison d'Or - qui est éloignée des empereurs carolingiens de près de six cents ans! Charlemagne est couronné en 800 et son père possède ces terres d'Aloxe par l'entremise de la Cathédrale de Saulieu dont il est suzerain. On pourrait imaginer ici que la générosité carolingienne a conduit ses rois à doter les établissements ecclésiastiques. Que nenni! C'est essentiellement Charles Martel - grand père de Charlemagne - qui a confisqué des terres aux bourguignons pour les attribuer aux religieux de Saint Andoche de Saulieu car il leur reprochait de s'être trop tièdement battus face aux Sarrazins à Poitiers! On le voit la grande histoire résiste aux images d'Epinal naïves qui seront créées de toute pièce quelques siècles plus tard.

Sur le plan cultural on observe avec acuité que c'est au cours de cette époque que le cépage pinot - sous une forme sans doute plus rustique - évolue progressivement vers le "pineault" ou "pineau fin" bien plus souvent baptisé "noirien" du Beaunoy. La terre de Corton est progressivement défrichée et représente pour la part ducale environ 100 ouvrées (4 hectares) en exploitation à la mort de Charles le Téméraire en 1477. Louis le onzième - probablement sans véritablement le savoir tant la domination politique lui est plus importante - voit alors ses terres cultivables lui échoir, les paysans restant évidemment en place et rien ne change véritablement pour eux en dehors de la "destination" de ses fruits du "Courton" comme on l'appelle alors. Cela se fait difficilement car la couronne royale n'est pas la bienvenue en ces contrées.

Le Clos du Roi n'est à ce moment qu'un simple lieu-dit dont l'usage est essentiellement oral et qui est considéré avec Renardes et la partie basse du Corton originel (les vignes situées au dessus de ces deux climats sans aller jusqu'aux vignes sous le bois qui sont méprisées) comme la meilleure partie des vins d'Aloxe car elle regarde directement le levant et se trouve en terre de "milieu" sur le coteau. Près de 300 années de misère s'écoulent et les vignes royales sont bien mal entretenues jusqu'à la révolution française qui se fera un devoir de revendre les biens nobiliaires - et donc royaux - non sans entériner, pour mieux vendre la parcelle, des usages constants et loyaux attribuant officiellement à la parcelle le nom de "Clos du Roi-Corton". La parcelle passe toutefois de 4 à près de 10 hectares circonscrit entre Pougets Languettes, Bressandes et Renardes...Et n'a probablement jamais été ceinte d'un vrai mur! Comme en Conti des Sans-Culottes se servent de la " noblesse" d' une terre pour la vendre plus chère selon 7 lots identiques. Pour le moins surprenant!

Dans le courant du Dix Neuvième siècle le banquier Ouvrard - qui possède le Clos de Vougeot entier et la Conti entre autres! - réussira à remembrer la quasi intégralité du cru puis il sera divisé à la fin de ce même siècle qui le connaîtra sous le nom de Clos du Roi-Corton uniquement. Puis le phylloxera passera par là avant de voir le Corton replanté en règes rectilignes sur des portes greffes américains et d'être classé grand cru au milieu des années 1930. Ainsi pour la première fois, juste avant la seconde guerre mondiale, naît le Corton Clos du Roi.

Pourquoi ne l'avoir nommé Clos du Roi Corton? Et bien simplement car le Corton est désormais officiellement situé sur 3 communes et que son identité première est le cru, qui dès lors est mis en avant...simple non!!? J'en vois certain sourire.

Clos du Roi mesure 10,74 hectares et forme un - quasi - parfait rectangle orienté à l'Est sur une pente ferme comprise entre 270,04 et 320,52 mètres. Son sol du bathonien chargé en oxyde de fer et fait de laves qui se délitent confère aux vins une nature rude et athlétique qui évoque le Champans de Volnay ou le Rugiens de Pommard avec une noirceur de fruit plus prononcée et une impression de plénitude encore plus forte parfois. Climat très homogène, parfaitement drainé et moins marqué par le calcaire que ceux du nuiton, il livre une partition sombre, ombrageuse et d'une rare intensité tannique et demande de la patience. Peu de crus ont cette forme austère et cette ligne générale puissante qui pourtant n'a absolument rien de terrienne. En effet les Corton sont des vins solaires qui captent à merveille la lumière et les vents grâce à une altitude élevée à ce niveau d'appellation et grâce à la bonne inclinaison de son coteau large, régulier et parfaitement filtrant qui draine les eaux de pluies et capte les sels minéraux qu'elles libèrent. De ce fait même il se positionne dans la commune comme un cru plutôt élégant et fin. Curieuse impression qui ne doit jamais faire oublier qu'il est toujours plus ferme et tannique que tous les crus du nuiton et du beaunois réunis en dehors de Nuits et Pommard. Il est un peu le Cailles de Nuits mais plus sûrement équilibré comme la partie supérieur des Epenots de Pommard.

A l'évidence Clos du Roi est un vin paradoxal car sa maturité de climat solaire n'est pas celle d'un cru chaleureux, tout au contraire, sa situation médiane haute laisse poindre des accents aromatiques fruités qui jouent sur un registre discret en faisant bonne place à une expression épicée d'une très fine subtilité. Les zones marneuses et cette terre imprégnée de potasse expliqueraient elles ce caractère quelque peu sauvage? Sans doute car ce vin de race, altier et dominateur est destiné à la maturation sous verre. Il ne pardonne jamais aux vinificateurs qui le sous-estiment et veulent forcer sa nature en cherchant le muscle ou - à contrario - en développant artificiellement une expression "euphémisée" d'une incongrue et inutile délicatesse. La vendange entière lui sied à merveille et sa chance est de souvent être complanté de plants fins qui autorisent ce mode opératoire complexe à mettre en œuvre mais si gratifiant lorsque cela est réussi. Je me souviens d'un éblouissant Clos du Roi 97 de Sénard qui transcendait encore la dimension du climat et puis d'autres jeunes, vieux, très vieux parés des atours nuancés et finement "réglissés/ligneux" de raisin non égrappés qui peuvent illuminer une cuvée.

De nombreux grands crus possèdent des terres de nature et de valeurs agronomiques variables, ce n'est pas véritablement le cas en Clos du Roi, même si la partie supérieure est plus fortement inclinée et qu'elle ressuie plus vite. Le sol de "laverottes" est assez homogène, sombre et semble marquer tous les vins d'une égale signature avec une profondeur de texture digne des meilleurs Richebourgs vosniers mais sans ses accents floraux et son infinie douceur. Cru du Beaunoy très affirmé il ne ressemble donc en rien "arômatiquement" à ses pairs du Nuiton ou du Sud de Beaune et pourrait même, je crois, perturber le dégustateur qui y est habitué car sa complexité provient des ses aspérités tanniques et de son équilibre très original centré sur une musculature saillante, une acidité discrète et une expression aromatique qui met les fruits frais en retrait. Point de griotte ou de fraise des bois à Corton mais en revanche cette sensation de croquer dans une mûre sauvage qui vient juste d'arriver à maturité en y associant des effluves de poivre blanc, de pivoine et d'un rien de cannelle...Corton est un grand seigneur et Clos du Roi son représentant le plus vibrant du côté de la puissance maîtrisée car il n'a pas la sauvagerie de Renardes voisines ou la texture plus souple du Bressandes en dessous de lui.

Patrick Essa - Producteur

 

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